Gastronomie : les merveilles du Maroc pour l'Atlas International du Patrimoine alimentaire


Qu’ont en commun la tradition du petit-déjeuner malaisien, le ragoût estonien Mulgi puder, les haricots fermentés coréens et le fromage Minas du Brésil ? Ils rejoignent tous l’Atlas international du patrimoine culinaire, une plateforme numérique mondiale mise en place par l’organisme culturel des Nations Unies pour préserver les traditions culinaires ancestrales.
Désormais, c’est au tour du Maroc, qui possède une gastronomie d’une diversité extraordinaire, mondialement prisée.
Dans la cuisine d’un restaurant traditionnel à Rabat, un chef décore une pâte sucrée de potiron, préparée avec du miel, de la cannelle, du beurre et de l’eau de fleur d’oranger, avec des éclats d’amandes soigneusement grillés. Dans un bol à côté, une simple salade marocaine est préparée, composée de tomates, de concombres, d’oignons et de persil, coupés en petits dés et garnis d’olives noires confites au sel. C’est l’une des salades les plus consommées au Maroc.
Les préparatifs se poursuivent au restaurant traditionnel Zyriab, où le chef apporte les dernières touches aux entrées chaudes et froides, dans une atmosphère imprégnée des arômes d’épices et de saveurs marocaines.
Chaque ville du Maroc est réputée pour sa spécialité, reflet de la richesse de la cuisine locale et de son lien avec l’identité culturelle et sociale du pays. « Chaque ville est connue pour son plat : par exemple, la pastilla de Fès, la tanjia de Marrakech cuite dans une jarre en argile, ou encore le tajine de bœuf aux pruneaux et abricots caramélisés à Rabat. La cuisine marocaine se distingue aussi par son équilibre nutritionnel », explique Amine El Boujadi, spécialiste et chercheur en gastronomie marocaine.
À l’une des tables, les serveurs apportent une sélection d’entrées à un client assis à côté d’Amine El Boujadi. Les plats arrivent un à un, reflétant une variété de saveurs et de textures. Le client goûte une entrée, savourant l’équilibre des ingrédients et des épices.
Des chefs préparent ensuite un tajine de poulet aux olives et citron confit, servi dans un plat en argent. Le plat est déposé devant le client : un poulet tendre baigne dans une sauce riche et parfumée.
Au-delà des ingrédients, le secret de la cuisine marocaine réside dans la maîtrise des épices et le savoir-faire du cuisinier à chaque étape de la préparation. « La cuisine marocaine repose énormément sur les compétences du cuisinier, car elle nécessite des techniques précises qui confèrent à chaque plat son goût unique », ajoute El Boujadi.
À 50 kilomètres de la capitale, sous une tente simple du village de Brachoua, un groupe de visiteurs se retrouve autour d’une table de petit-déjeuner traditionnel. Un homme verse le thé à la menthe, les convives savourent son goût doux et rafraîchissant. La table est garnie de pains traditionnels variés, de crêpes marocaines comme le meloui, la harcha et le batbout, accompagnées de miel, de dattes, de beurre naturel, d’œufs bio et d’olives noires.
Parmi les éléments qui distinguent la table du petit-déjeuner marocain, on trouve sa reliance aux produits du terroir, préparés selon des méthodes traditionnelles, sans additifs ni conservateurs.
Aicha Sellahi, présidente de l’association Ahl Al-Sahra pour le développement dans le village de Brachoua et partenaire de la coopérative alimentaire Golden Sands, explique : « Le petit-déjeuner marocain est composé d’ingrédients naturels et traditionnels tels que le thé, les crêpes marocaines, le beurre naturel, le miel pur et le pain cuit dans un four traditionnel. »
Naima El Meziane, présidente de la coopérative Golden Sands, retire le pain du four traditionnel. Les miches ont bien levé, affichant des croûtes dorées et croustillantes. Ce pain se caractérise par sa légèreté et sa haute valeur nutritive, grâce à des recettes ancestrales transmises de génération en génération. « Lorsqu’on pétrit le pain, on ajoute du levain naturel et on utilise de la farine de blé et d’orge riches en fibres. C’est ce qui distingue le pain traditionnel de celui vendu en boulangerie : il est bien plus sain grâce aux fibres et au levain naturel », précise El Meziane.
Dans la même coopérative, la cuisinière Laila El Harmaoui commence à préparer un plat appelé rfissa. Elle met des poulets bio dans une cocotte-minute avec des oignons émincés, puis ajoute des lentilles et des graines de fenugrec. Des gousses d’ail entières et du smen (beurre rance maison) sont incorporés, pendant qu’une autre femme découpe à la main les crêpes meloui, élément essentiel qui accompagne ce plat. Comme le tajine, la rfissa est cuisinée sur charbon de bois et conserve ainsi ses bienfaits nutritionnels grâce aux ingrédients naturels et à la cuisson lente.
Le couscous est préparé dans une grande marmite, où le poulet mijote avec des oignons, des tomates, des épices et de l’huile d’olive. On y ajoute ensuite des légumes comme les carottes, le potiron et les courgettes.
Le tajine est l’un des plats les plus populaires du Maroc et peut être décliné de multiples façons selon les goûts et les régions. « Le plat le plus célèbre reste le tajine, car il est cuit dans un plat en terre cuite. Il est aussi sain. Il peut être préparé aux pruneaux, aux oignons et raisins secs, ou encore aux olives. On peut aussi le faire entièrement aux légumes, et il reste sain grâce à sa cuisson au charbon de bois », explique El Harmaoui.
Une vieille femme prépare un tajine de bœuf aux pruneaux, ajoutant épices, ail et oignons avant de le laisser cuire à feu doux. Le plat donne une sauce onctueuse, douce et légèrement sucrée, souvent servie lors des grandes occasions.
Le 21 avril 2025, le Maroc a lancé le processus de concertation nationale pour un projet de l’UNESCO visant à publier pour la première fois un Atlas international du patrimoine culinaire, ainsi qu’une plateforme numérique destinée à préserver, promouvoir et valoriser ces patrimoines alimentaires pour les générations futures. Le Maroc fait partie des pays retenus pour la phase pilote du projet.
La publication de la première version de l’Atlas est prévue pour fin 2027.
Selon l’UNESCO, la cuisine traditionnelle ne se limite pas à ce que l’on mange. L’organisation des Nations Unies affirme qu’elle contribue au développement de la vie économique et culturelle d’un pays comme le Maroc. Elle englobe l’agriculture, la pêche, les techniques et savoir-faire culinaires, ainsi que des modèles de production alimentaire durable, comme la diversité des semences et la préservation des écosystèmes.
Amine El Boujadi réagit : « La nouvelle du partenariat entre le Maroc et l’UNESCO pour le projet de l’Atlas international nous a beaucoup réjouis, car préserver la cuisine marocaine, ses techniques, ses savoir-faire et ses plats est une démarche très positive. »
Les visiteurs se rassemblent sous la tente pour un déjeuner festif composé de tajine de bœuf aux pruneaux, de rfissa et de couscous. Le pain est découpé et les mains se tendent pour partager les plats dans la plus pure tradition.
Malgré l’intérêt croissant des Marocains pour les cuisines d’autres cultures, les plats locaux conservent leur place, assure la cliente Naima Metrab : « La particularité de la cuisine marocaine reste intacte. On remarque que les étrangers, notamment les touristes, sont fascinés par les plats marocains comme le tajine, le couscous ou la rfissa. »
Le Maroc est aussi réputé pour sa street food. Sur la place Jemaa El-Fna, au cœur de la médina de Marrakech, visiteurs et locaux se retrouvent autour des stands pour goûter des spécialités populaires comme les escargots, les têtes de mouton ou encore le poisson frit, reflet d’une autre facette de l’extraordinaire patrimoine culinaire marocain.
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