Tunisie : l’ex-président Moncef Marzouki condamné à 22 ans de prison par contumace


Un tribunal tunisien a condamné, vendredi 20 juin, l’ancien président Moncef Marzouki à vingt-deux ans de prison dans le cadre d’une procédure par contumace.
Selon les autorités judiciaires, il aurait commis des actes portant atteinte à la sécurité de l’État, bien que les chefs d’accusation précis n’aient pas été rendus publics.
Moncef Marzouki, figure emblématique de la transition démocratique post-révolution, avait exercé la présidence entre 2011 et 2014, dans la foulée du soulèvement populaire ayant mis fin à la dictature de Zine el-Abidine Ben Ali. Installé en exil à Paris, l’ancien chef de l’État a vivement réagi à cette condamnation sur les réseaux sociaux. Qualifiant la décision de « nulle », il a dénoncé un procès politique et une tentative désespérée du pouvoir en place de « museler l’opposition » et de détourner l’attention de la crise économique et sociale qui frappe la Tunisie.
Ce jugement s’ajoute à deux précédentes condamnations : en 2021, Marzouki avait écopé de quatre ans de prison pour avoir critiqué l’organisation du Sommet de la Francophonie en Tunisie, et d’une autre peine de huit ans l’an dernier. Au total, ce sont désormais plus de trente années de prison qui ont été prononcées à son encontre.
Cette décision intervient dans un contexte de durcissement autoritaire depuis l’instauration, en juillet 2021, d’un régime présidentiel de fait par Kaïs Saïed. En s’arrogeant les pleins pouvoirs après avoir suspendu la Constitution, dissous le Parlement et gouverné par décrets, le président a progressivement neutralisé les contre-pouvoirs institutionnels. Ses détracteurs dénoncent une instrumentalisation croissante de l’appareil judiciaire contre toute forme de contestation.
Ce même vendredi, Sahbi Atig, haut responsable du parti Ennahdha, principale formation d’opposition d’inspiration islamo-conservatrice, a lui aussi été condamné à quinze ans de prison pour blanchiment d’argent. Une peine sévère, mais inférieure à celles prononcées en avril dernier contre d’autres figures de l’opposition, certaines atteignant jusqu’à 66 ans de réclusion pour complot présumé.
La plupart des chefs de partis politiques tunisiens sont aujourd’hui emprisonnés. Parmi eux, Rached Ghannouchi, président d’Ennahdha, arrêté en 2023, ainsi qu’Abir Moussi, dirigeante du Parti libre constitutionnel (PLCT) et opposante virulente à la fois à Saïed et aux islamistes.
Plusieurs organisations internationales de défense des droits humains, dont Amnesty International et Human Rights Watch, tirent régulièrement la sonnette d’alarme. Elles accusent le pouvoir tunisien d’ériger un régime autoritaire en restreignant les libertés publiques, en muselant les médias indépendants et en multipliant les procès politiques.
Pour Moncef Marzouki, la cause est entendue : « Ces juges ne représentent ni la justice ni la souveraineté populaire. Ils devront rendre des comptes. La démocratie reviendra », a-t-il affirmé.
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